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Para agricole
Éric Caillet, banquier depuis 28 ans et observateur du monde agricole

Le banquier, parfois redouté, est pourtant incontournable dans la vie d’une exploitation. Éric Caillet, conseiller agricole à la Banque populaire, accompagne des producteurs en Deux-Sèvres et en Charente-Maritime. Portrait.

© Léa Calleau

Conseiller agricole à la Banque populaire, Éric Caillet ne veut pas parler emprunt, placement ou épargne… Il botte en touche à la question sur les produits bancaires. Ce dont il veut parler, c’est de son métier, qu’il sait critiqué et mal perçu. Pourtant, « Quand on interroge les Français sur les banques en général, 66% en ont une opinion favorable, mais si on leur demande par rapport à leur conseiller bancaire, ils sont 73% à émettre un avis positif », souligne-t-il.

Ce qui prime, dans son travail, c’est l’écoute, la qualité de la relation et la confiance. Autant d’expressions qui tranchent avec un secteur fortement associé à l’argent. « Les produits bancaires sont à adapter en fonction de la personne, explique-t-il. L’écoute est capitale pour comprendre les mécanismes de décision. Je dois savoir ce que veut l’exploitant et ce que lui impose son environnement, en premier lieu familial, puis réglementaire ». À titre d’exemple, il fait référence au film Au nom de la terre, de Édouard Bergeon. Au-delà de sa dimension dramatique, le film représente avec justesse les mécanismes de décision. Là où l’agriculteur a la main, mais aussi là où il ne contrôle plus…

« Tout est une question de confiance, le reste, ce ne sont que des signatures de papier ».

Fils d'agriculteurs

Le monde agricole, Éric Caillet le connaît et pas uniquement par les films. Fils d’agriculteurs, il a suivi une formation agricole avant d’entrer dans la banque et d’accompagner à son tour des professionnels de la terre, sur les secteurs du sud Deux-Sèvres et nord Charente-Maritime. Cela fait aujourd’hui 28 ans. « Je reçois des jeunes que j’ai vu gamins », sourit-il derrière son masque, adoucissant ses yeux clairs.

Chaque client a besoin d’une proposition sur mesure.

« On dit que la banque finance du matériel, un élevage, un bâtiment… C’est faux. On finance toujours une personne ».

D’un professionnel à l’autre, les mêmes outils ne donnent pas les mêmes résultats. « Je regarde les hommes, leur parcours, leur capacité à gérer l’économie, la technique, leur réaction face aux aléas. Est-ce qu’il s’effondre ? Est-ce qu’il résiste ? » En quelques rendez-vous et une visite d’exploitation, le conseiller arrive à cerner son interlocuteur. « J’ai eu un client qui voulait monter une unité d’abattage pour un atelier de transformation de volailles. Je lui ai dit : je ne crois pas en l’outil en soi, mais je crois à votre capacité d’en faire bon usage ». 

Rebattre les cartes

À l’heure où l’agriculture est bouleversée par de multiples crises, Éric Caillet observe un changement de modèle chez des producteurs proches de la quarantaine. « Ils se posent tous la même question stratégique : faut-il faire plus de volume ou aller chercher de la valeur ajoutée ? Ils comprennent que leurs marges ne vont pas augmenter, alors que les charges, oui ». Pour cette génération, la conduite d’une exploitation s’est toujours faite sur une ligne de crête. Contrairement à leurs prédécesseurs, ils n’ont pas pu accumuler les marges. « Un client me disait très justement que quand son père vendait douze bœufs pour s’acheter un tracteur, lui devrait vendre son troupeau aujourd’hui, soit le capital de l’entreprise » !

Certains se tournent vers le circuit court et la vente directe. « Nous accompagnons historiquement une clientèle tournée vers la vente directe, rappelle Éric Caillet. Il y a eu des pionniers, avec Plaisirs Fermiers, qui ont commencé alors que l’opinion n’était pas favorable. Ils ont réussi à créer de l’emploi. Aujourd’hui, certains ont peur d’être face aux clients. Je les encourage à passer le cap quand je pense qu’ils en ont les capacités ».

Le premier pas est difficile car il demande un changement de mentalité : « Un de mes clients signe sans sourciller un bon de commande de 100 000€ afin de s’équiper d’un nouveau tracteur. Mais pour un outil de vente directe, il hésite ». Loin d’encourager à l’agrandissement ou à l’augmentation du cheptel, Éric Caillet assure que le seul objectif qui vaille, « c’est gagner de la qualité de vie ». 

L’agriculture, un secteur économique à part

Les fermes demeurent familiales, basées sur un modèle d’accumulation du patrimoine. « C’est le seul modèle économique avec peu de rotation du capital, relève Éric Caillet, conseiller agricole à la Banque populaire des Deux-Sèvres. L’agriculture doit aller vers le modèle économique le plus répandu dans la société. C’est un secteur sous-capitalisé ». Cette approche, qu’il qualifie de hors-sol, a une incidence au moment de céder l’exploitation. « Les exploitants ont mis toute une vie pour construire leur entreprise. Quand ils la cèdent, ils vont regarder le patrimoine. Si on additionne la valeur des biens, on se retrouve avec des montants énormes… Alors qu’ils devraient regarder la rentabilité, ça vaut souvent beaucoup moins » ! Le manque de capitaux fait défaut car la banque ne peut pas tous les apporter. « C’est trop risqué pour nous et pour l’intéressé. Je prends souvent l’image de la course à pied, plus on est léger plus on va loin. C’est la même chose avec un crédit ».
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