Recrutement : la restauration reste en carafe
Dans la restauration, la conjoncture n'est pas très bonne. Paul Pourel, président de la branche restauration de l'Umih dans la Vienne, pointe plusieurs sujets qui compliquent le quotidien des 993 établissements du département. Parmi lesquels le recrutement.
Quand il a créé le Moulin de la Norée, en 2019, Paul Pourel avait déjà identifié des soucis de recrutement. "Les employés bougeaient facilement, mais on trouvait" explique le directeur de l'établissement, qui ajoute que trouver un salarié est désormais vraiment compliqué. "Je n'embauche par exemple que des serveurs de métier, et il y a une grosse concurrence, à la fois en France, mais aussi avec l'étranger, où les jeunes veulent aller". Alors qu'il rappelle que le nombre de cafés-restaurants s'est effondré, notamment en milieu rural, il ajoute que des offres nouvelles de restauration sont apparues, comme autant d'établissements concurrents, à la fois pour la clientèle, mais aussi le recrutement de salariés.
Trop d'offres ?
"Il y a les food trucks, les établissements de restauration rapide, les poissonneries qui se diversifient..." Lui qui est aussi le représentant de la branche restauration au sein de l'Union des Métiers et des Industries de l'Hôtellerie de la Vienne (Umih), pense qu'un restaurant pour 500 habitants serait suffisant, alors qu'en France, la balance est actuellement de 1 restaurant pour 370 habitants. Dans la Vienne, c'est 1 restaurant pour 430. Pour attirer plus de jeunes dans les métiers de la restauration, Paul Pourel assure que les professionnels font évoluer les conditions de travail. "Dans mon restaurant, par exemple, j'ai acheté une machine pour les verres. Ça n'était pas intéressant pour les salariés de le faire eux-mêmes, ce n'était pas rentable, et en plus, laver et essuyer des verres en quantité, ça peut provoquer des troubles musculo squelettiques.". Niveau planning, de plus en plus de restaurants s'organisent également sans coupure, ou évitent le travail les jours fériés. "On peut vraiment s'éclater dans la restauration, il faudrait redonner ses lettres de noblesse à nos métiers" estime Paul Pourel. Son établissement dispose du titre "Maître restaurateur", délivré par l'État, et il travaille sur le label Eco Table. "Pour attirer les jeunes, il faut donner envie de venir dans nos établissements". Au sein de l'Umih, différentes opérations ont été créées en ce sens : les Savoirs Fiers (lire l'article ci-dessous), la mise en place d'un "permis d'entreprendre", pour s'assurer que les porteurs de projets soient suffisamment préparés à l'ouverture d'un restaurant. Dans la Vienne, 4 établissements proposent des formations pour les métiers de la restauration : Marc Godrie à Loudun, les Terres Rouges à Civray, Kyoto à Poitiers et le Campus 120 à Poitiers. Est-ce suffisant ? "Effectivement, il en faudrait plus ! Mais si tous les élèves qui y sont étaient des passionnés, ce serait déjà beaucoup !". La filière professionnelle est en effet encore trop souvent utilisée comme une voie de garage, vers laquelle des élèves en difficulté scolaire sont orientés.
"Aller chercher les jeunes"
Depuis 2022, la CCI de la Vienne, la Direction départementale de l'emploi, du travail et des solidarités de la Vienne et l'Umih 86 proposent l'opération "Savoirs fiers", dont l'objectif est justement de travailler sur les problèmes de recrutement dans le monde l'hôtellerie, café et restauration. C'est dans ce cadre que 10 élèves du collège Arthur Rimbaud de Latillé sont allés visiter le Château de Périgny, la semaine dernière. "Nous avons proposé cette visite à nos élèves, et ceux qui sont là, sont des jeunes qui se questionnent sur ces métiers" explique Cyrille Savary, proviseur de l'établissement, qui met en place un Plan Pluriannuel d'Orientation basé sur un accompagnement individuel. Élèves en 5e, 4e et 3e, ils ont tout d'abord eu une présentation du Château et de son fonctionnement par Christine et Thierry Baratte, les propriétaires. "On est toujours en recherche de personnel, et si on veut des jeunes, il faut aller les chercher" explique notamment Thierry Baratte, qui a notamment présenté les avantages et les inconvénients des métiers qu'il propose, avant de faire visiter l'établissement, mais aussi de garder les jeunes pour le déjeuner. "Il n'y a pas un chemin tracé, on peut entrer dans nos métiers par différents moyens, et on peut évoluer très rapidement". Le professionnel a notamment rappelé que les contraintes de ces métiers, notamment le rythme de travail, avec des coupures, évolue, pour attirer plus de jeunes. "Et nous avons aussi de nouveaux métiers, comme ceux liés à la présence de spas dans nos établissements".