L'éleveur se retrouve à sec pour 2026
Les autorisations de prélèvement sur le bassin du Clain baissent drastiquement pour 2026. Exemple de l'impact de cette évolution sur un élevage porcin d'Aslonnes, celui d'Eric Dion.

Ce courrier reçu le 1er octobre a été pour Eric Dion un véritable "coup de massue". C'est là qu'il a découvert les autorisations de prélèvements dont il va disposer pour 2026: 20 000m3 pour son exploitation, et 10 000m3 pour la Cuma qu'il partage avec un autre agriculteur.
-53 à -77% d'autorisations de prélèvement
Soit 90 000 m3 de moins qu'en 2025 (il disposait cette année de 75300 m3 pour son exploitation et de 50 000 m3 pour la Cuma). "On bénéficiait d'un volume dérogatoire, dans l'attente de la mise en place des réserves sur le bassin du Clain" explique l'éleveur porcin d'Aslonnes. Les réserves de substitution sont loin d'être sorties de terre, mais la Préfecture a décidé de ne pas renouveler ces dérogations. Pour le bassin, cela représente une baisse de 53% des prélèvements en nappes et de 77% pour ceux en rivière. Et les baisses d'autorisations vont continuer jusqu'en 2029. "En 2026, il y a 22 millions de m3 autorisés, et ce sera 16 millions en 2029. On savait que cela allait finir par arriver, mais on ne pensait pas que le couperet tomberait en une fois, et aussi rapidement. Et surtout, dans une année difficile..." Eric Dion a entendu les propos du Préfet qui préconise de cultiver moins de maïs et de réaliser des réserves plus petites que celles qui ont été pour l'instant envisagées. "Mais pour l'année prochaine, c'est trop tard! Et je ne suis pas sûr que si je mets 70 000 m3 d'eau dans une réserve, elle sera mieux acceptée localement. Et puis, il y a toujours les recours" s'agace l'agriculteur, qui est engagé dans un projet de réserve de 300 000 m3, avec deux autres agriculteurs. "On ne peut pas non plus mettre du blé partout, car il faut des rotations pour la vie du sol, et ce n'est pas possible, avec la Pac!"
200 tonnes de maïs à acheter pour les porcs
Avec les 20 000m3 attribués pour son exploitation, il pense pouvoir irriguer 11ha de maïs. Une culture qu'il réalise pour nourrir ses porcs. "Je pense qu'il faudra donc que j'achète 216 tonnes de maïs pour les nourrir. Soit à peu près 40000 euros". Sur ses 160 hectares, Eric Dion cultive en général 35 ha de maïs, 15 ha de colza et 110 ha de blé et d'orge. L'irrigation a débuté sur l'exploitation familiale, en 1976. "Ici, on est sur des terres de groies légères, avec très peu de réserves. Il faut donc parfois arroser même le blé et l'orge". Il a d'ailleurs fallu deux passages cette année pour ces cultures. "Si je garde mes 20 000 m3 pour irriguer 11ha de maïs, je ne pourrais donc plus du tout irriguer le blé ou l'orge." S'il perd 10 quintaux de rendement, il estime qu'il aura 110 tonnes de moins, soit une perte de 20000 euros. "En 2005, quand on n'avait pas du tout pu irriguer, j'avais fait un rendement de 17 quintaux..." Au total, calculette à la main, il annonce que la perte pour son exploitation pourrait être de 60 000 euros. "Et avec des cours du porc qui sont très changeants, c'est vraiment inquiétant. Le prix du porc vient de baisser à 1,59..." L'éleveur se dit déçu que l'article de la loi Duplomb (qui imposait une prise en compte des impacts socio-économiques des évolutions de politique de l'eau) ne soit selon lui pas appliqué. Alors quand on lui demande ce qu'il va faire, il répond, le regard un peu perdu: "Je ne sais pas". Il pense mettre en vente ses enrouleurs, achetés en 1997, 2003 et 2015, et a vraiment du mal à se projeter. "Certains agriculteurs expliquent qu'ils vont mettre leurs terres en jachère. A 200€/hectare à la Pac, je pense qu'il y en a qui vont le faire."