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Un plan de transition écologique

Jean-Pierre Raynaud, vice-président de la région Nouvelle-Aquitaine, explique la place importante occupée par l’agriculture dans le plan de transition environnementale et climatique.

Ancien président de la Chambre d’agriculture de Dordogne, Jean-Pierre Raynaud est aujourd’hui vice-président de la région Nouvelle-Aquitaine en charge de l’Agriculture.
Ancien président de la Chambre d’agriculture de Dordogne, Jean-Pierre Raynaud est aujourd’hui vice-président de la région Nouvelle-Aquitaine en charge de l’Agriculture.
© Réussir Le Périgord

Adopté en séance plénière le 9 juillet par les élus de la Région Nouvelle-Aquitaine, Neo Terra vise à amplifier la transition écologique sur le territoire régional face à l’augmentation des températures et ses conséquences. Le programme comprend onze ambitions à développer à l’horizon 2030. On y retrouve des thèmes aussi divers que la mobilité propre, le traitement des déchets, la protection des ressources naturelles et de l’eau, la mutation des pratiques des entreprises ou encore l’engagement citoyen. Le plan s’appuie sur deux rapports scientifiques : Acclimaterra portant sur les questions climatiques et Ecobiose, une étude de la biodiversité régionale. Alain Rousset, le président de la Région, a clairement dit sa volonté d’accélérer la mutation des pratiques agricoles. Il veut une sortie de l’usage des pesticides en 2030. Le plan prévoit aussi l’arrêt total des substances CMR (cancérigène, mutagènes et reprotoxiques) utilisées essentiellement en viticulture. Même si la collectivité ne possède aucun pouvoir législatif en la matière, il s’agit d’aider les agriculteurs à anticiper le durcissement des lois en matière d’utilisation des produits phytosanitaires.

Quelle est la genèse du plan Neo Terra mis en place par la Région ?
Jean-Pierre Raynaud : En 2010, la Région Aquitaine avait lancé un travail avec Hervé le Treut, climatologue du Giec, sur l’incidence du changement climatique sur la région. Cela nous avait montré que nous étions le territoire le plus impacté par le réchauffement climatique. La pluviométrie serait égale mais avec une répartition différente dans le temps. À l’époque, la pression médiatique et populaire n’était pas aussi forte que maintenant. À la fusion des Régions, on a lancé un travail plus approfondi et global avec une communauté scientifique renforcée avec le programme Acclimaterra sur les conséquences du réchauffement climatique. Un autre travail est en cours avec le CNRS de Chizé et l’Inra sur l’état de la biodiversité de régionale. C’est Ecobiose. L’émission Cash investigation sur la situation des vignes de Bordeaux fut une alerte pour l’ensemble de la communauté politique et professionnelle. Il y a eu une prise de conscience afin de ne pas rester sans réponse face à ces attaques. L’État a lancé les Tiga, Territoires d’innovation de grande ambition. La Région avait répondu à plusieurs appels à projet. Le seul à avoir été retenu est VitiREV afin de préparer la sortie des pesticides. La labellisation devrait intervenir en septembre ou octobre. L’essentiel est d’avoir des moyens de recherche et d’accompagnement. Cela devrait se chiffrer à quelques dizaines de millions d’euros.

Il s’agit avec VitiREV de trouver des alternatives aux pesticides dans les vignobles. Neo Terra fixe pour objectif de sortir des pesticides de synthèse en 2030…
J.-P. R. : Il faut chercher des alternatives en matière de biocontrôle, de machinisme ou dans la recherche variétale. Si VitiREV ne concerne que la viticulture régionale et regroupe toutes les interprofessions viticoles, les solutions trouvées pourront aussi s’appliquer dans l’agriculture. Les produits de biocontrôle qui lutteront contre les maladies cryptogamiques comme le mildiou ou l’oïdium auront des effets dans d’autres productions. Notre ambition est aussi de créer des passerelles entre les secteurs agricoles. VitiREV s’inscrit dans les ambitions de Neo Terra.

Parmi les actions à mettre en place, quelles sont les plus faciles et les plus compliquées ?
J.-P. R. : Si je prends l’agriculture, à l’échelle de 2030, on veut atteindre 80 % des exploitations de Nouvelle-Aquitaine certifiées bio ou HVE (Haute valeur environnementale) ou équivalent. Tout le monde dit que ce sera relativement facile à mettre en œuvre même s’il existe beaucoup de questions sur la HVE. Une réflexion se déroule au niveau national pour adapter le cahier des charges, qui au départ a été fait pour la viticulture, aux exploitations en polyculture-élevage. Sur la sortie des pesticides, à l’heure actuelle, on n’a pas toutes les solutions. C’est là qu’il faut mobiliser le plus largement et changer les pratiques agricoles.

Comment comptez-vous accompagner les agriculteurs dans le changement de leurs pratiques ?
J.-P. R. : On réfléchit à des dispositifs qui pourraient être une garantie pour l’agriculteur qui tente de nouveaux itinéraires culturaux. S’il se plante, il pourra bénéficier d’une indemnité de compensation, véritable accompagnement à la transition et à la prise de risque. La bio a déjà ses accompagnements. Ce fonds concernerait plutôt les exploitants qui se lancent dans l’agriculture de conservation, le non-labour et le semis direct. Il faut le temps de maîtriser ces nouvelles techniques. On va aussi partir sur de nouvelles espèces culturales et variétales. À chaque fois, il faut apprendre. On y réfléchit avec l’État, mais aussi les organisations économiques et les coopératives. On espère aussi bénéficier d’un dispositif dans le cadre de la prochaine PAC. On souhaite créer une sorte de fonds assurantiel. La Région serait un des partenaires de ce fonds. Le CNRS réfléchit à l’articulation d’un tel dispositif. On espère avancer sur ce projet dès l’année prochaine.

Justement, le contexte économique est très difficile pour certaines filières comme l’élevage bovin. La conjoncture n’est-elle pas trop défavorable pour demander aux agriculteurs de consentir à de tels changements ?
J.-P. R. : Notre objectif n’est pas d’embêter les paysans ni de réduire la compétitivité de l’agriculture mais de se demander comment on se prépare à quelque chose qui, de toute manière, nous sera imposé. Sur la sortie des pesticides, la Région n’a aucun moyen d’impositions. On se situe dans l’incitatif. La société s’oppose de plus en plus aux pesticides. On voit des agriculteurs se faire agresser lorsqu’ils traitent leurs céréales ou leurs vignes. Il s’agit avec Neo Terra d’anticiper les effets d’une législation qui sera de plus en plus restrictive.

La Région a-t-elle budgété le coût du plan Neo Terra ?
J.-P. R. : Ce programme n’est pas budgété car il implique plusieurs domaines. On s’attend à un effet de Neo Terra notamment sur le budget de l’agriculture. Cela va nous amener aussi à revoir et réorienter nos aides. On aura besoin d’un volet d’accompagnement des Chambres d’agriculture et des structures comme les coopératives. On recherche aussi l’autonomie protéine sur la région. Pour cela, il faut créer des filières et avoir les outils économiques et de transformation de ces protéines. Tout cela doit être créé et demandera des investissements importants. Comment peut-on passer un contrat de confiance avec les agriculteurs pour accompagner cette transition ? Nous n’avons pas capacité à les obliger. Nous voulons juste convaincre. D’ailleurs, nous sommes un peu inquiets de voir que l’État veut diminuer les ressources des Chambres d’agriculture alors que le besoin d’accompagnement des agriculteurs va atteindre un niveau jamais connu.

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