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« La période de beau temps est terminée… »

Connu pour ses sujets économiques sur RTL et TF1, François Lenglet est intervenu lundi dernier lors du Rendez-vous Cerfrance organisé à Jaunay-Marigny. De quoi livrer sa vision des crises actuelles.

François Lenglet estime que la période du « beau temps » est terminée, mais que d’autres opportunités apparaissent. 
© Elisabeth Hersand

Quelle vision portez-vous sur l’économie actuelle et les crises qui se multiplient ?

Je pense qu’on sort d’une période de beau temps incroyable. Cette période, c’était celle qui avait suivi la chute du mur de Berlin, qui avait moins de risques géopolitiques, et pendant laquelle la mondialisation s’est développée. Le double inversé de la chute du mur, c’est la guerre en Ukraine. Cette période de beau temps est finie, et on voit de nombreux nuages arriver. Ils sont un peu liés entre eux, et sont, selon moi, les symptômes de la transition. La période entre 1870 et 1914 était similaire à celle dont nous sortons, avec peu de risques géopolitiques, et un moment d’innovations incroyables. On n’est évidemment pas à la veille de 1914, mais cette période de beau temps est terminée.

La guerre en Ukraine est un de ces nuages ?

Oui, mais on attribue ce conflit à Poutine, alors que le phénomène clé, c’est le déclin du « maître du monde ». Les États-Unis sont désormais un pays divisé, dans lequel les présidents se sont succédé, sont âgés ; l’espérance de vie des Américains diminue… Et son leadership est d’autant plus remis en question que la puissance de la Chine a connu une croissance incroyable. Son PIB représente aujourd’hui 20 à 25 % du PIB mondial, alors qu’il y a 40 ans, c’était 5 %.

Qui est selon vous le prochain « maître du monde » ?

Je ne crois pas que la Chine soit capable de s’imposer, notamment à cause de sa démographie. Le pays vieillit à grande vitesse, car les Chinois ne font plus d’enfant. Chaque année, la population active de la Chine baisse de 7 millions de personnes. On arrive à la fin de la croissance folle du pays, et le krach immobilier arrive. La Chine a connu le plus grand exode rural de tous les temps : 400 millions de personnes ont été déplacées, et il a fallu les loger, construire les écoles, des piscines… La croissance, c’était ça, mais c’est fini. Je pense que ce n’est pas un pays colonisateur, et qu’il ne peut pas s’imposer comme maître du monde. Mon pari, c’est que la période dans laquelle nous entrons sera sans une puissance précise qui va s’imposer, mais avec des zones d’influence. L’économie devient fragmentée, et se construit par secteurs, avec les « amis ». Ce qui veut dire que c’est la politique qui va imposer ses règles à l’économie, contrairement à ce qu’on a vécu pendant la parenthèse, depuis la chute du mur de Berlin.

Ces évolutions ont-elles des bons côtés ?

Oui, notamment car on va assister à une vague de relocalisations. Les États-Unis ont déjà commencé, avec un plan annoncé par Biden pour produire dans le pays les semi-conducteurs. Actuellement entre 60 et 70 % de ces produits sont fabriqués à Taïwan. L’Europe a les outils pour le faire. Le mauvais côté, c’est que le monde est instable, mais le bon c’est qu’on va s’équiper.

Une des conséquences, c’est l’inflation. Va-t-elle durer ?

Oui, je pense que cela ne fait que commencer ! Quand on était dans la mondialisation, on a pactisé avec le diable, la Chine, et nous allons donc désormais payer nos produits plus chers. En France, le nombre de retraités ne fait que progresser, et il y a moins de jeunes. Au final, il y a moins de ponctions sur le monde du travail. La bonne nouvelle, c’est que le rapport de force entre les employeurs et les employés est en train de s’inverser. Il faut que les employeurs s’y préparent, car les salaires vont progresser. Depuis 35 ans, le capital a profité du travail, et ce déséquilibre n’est pas bon, à la fois d’un côté social, mais aussi pour l’économie.

Et la crise énergétique ?

Le bon côté de la crise actuelle, c’est qu’elle renforce les incitations à chercher des innovations.

Quel impact pour la France ? J

e pense que c’est le retour de la souveraineté. Même Ma-cron, qui est libéral, a évoqué ce terme. Mais attention, pour que la France soit à l’aise dans ce monde, il faudra qu’elle ait une puissance publique importante. Actuellement ce n’est pas le cas. Nous avons des impôts élevés, mais des services publics qui ne fonctionnent pas. Dans le monde d’avant, ce qui était important, c’était la compétitivité des entreprises. Désormais c’est la compétitivité de l’État qui va compter.

Et pour l’Europe ?

Cela peut avoir des effets positifs. En quelques semaines, l’Europe a su organiser les vaccins, et s’est saisie de la crise énergétique. On voit enfin poindre une Europe qui protège. Mais attention, l’Europe a toujours dans l’idée qu’il faut accepter des produits du monde entier, pour que les consommateurs en profitent. Par exemple, pour les marchés publics, ce sont toujours les mieux-disants au niveau du prix qui gagnent, et les marchés sont ouverts. Face à nous,  on ne prend pas de gants, comme les États-Unis, avec le Buy American Act ou en Chine. Il faut s’adapter à ce monde qui change.

François Lenglet sort un ouvrage où il exprime ce point de vue, : « Rien ne va, mais… », à paraître le 13 octobre chez Plon.

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