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Viande bovine
Entente illicite pour les uns, droit de vivre pour les autres

Des éleveurs de tout le Poitou-Charentes se sont relayés pendant plus de deux jours. Leur objectif : bloquer l’abattoir de Bressuire. En établissant un rapport de force, les producteurs entendent voir le prix du kilo de viande revalorisé

Philippe Martineau, président de Terrena viandes, signait le protocole d’accord pour l’utilisation de la machine à classer dans les abattoirs du groupe. L’une des revendications des manifestants.
Philippe Martineau, président de Terrena viandes, signait le protocole d’accord pour l’utilisation de la machine à classer dans les abattoirs du groupe. L’une des revendications des manifestants.
© DR

«Il n’y a que les imbéciles qui ne changent pas d’avis .» Ce lundi,10 heures, Alain Chabauty, sur le piquet de grève depuis 3 heures du matin, prend le risque de passer pour « un utopiste ». « Certes les accords sont illicites. Toutefois, et l’exemple de la filière lait le montre, le gouvernement fait preuve d’une certaine tolérance à leur égard. Je ne désespère pas de voir l’Europe avancer également dans ce domaine. »
Alors, oui, à Bressuire ce matin, devant les locaux de l’abattoir, entre les tracteurs et les remorques transformées en QG des manifestants, la cinquantaine d’éleveurs mobilisés appelle les deux opérateurs Terrena et Bigard à « s’entendre ». Dans le bocage, en Deux-Sèvres, en Vienne, en Poitou-Charentes comme sur le reste du territoire français, les éleveurs s’essoufflent. « Nous bloquons ici, mais également d’autres sites du grand Ouest de la France. Les opérateurs de la filière doivent comprendre qu’il ne nous est plus possible de perdre de 70 centimes à un euro sur chaque kilo de viande vendu .» Les éleveurs, à l’appel de la FNB, revendiquent une revalorisation rapide de leur produit. L’augmentation des charges plombe l’équilibre financier des structures.

Deux jours de blocage
Dans les bureaux de JBO, Gérard Péverol, directeur, fait preuve d’empathie. Sept heures après le début de la manifestation qui anesthésie l’abattoir de Bressuire, c’est avec pédagogie qu’il choisit d’expliquer aux membres de la délégation venue à sa rencontre, ses exigences : « 0,09 centime d’euro le kilo de viande vendu ». Sur le paperboard, le directeur de l’abattoir de Bressuire pose un à un les chiffres clés de son activité. 12 salariés à JBO. 60 000 taurillons vendus chaque année. 25 000 tonnes de viandes commercialisées principalement en Italie et en Grèce. Un prix d’achat des animaux – femelles primées ou jeunes bovins - allant de 3,30 à 3,45 euros du kilo. 0,12 centime de coût d’abattage. « Une fois la marge de fonctionnement de l’entreprise intégrée, nous revendons à nos clients autour de 3,66 euros le kilo. Et nos commerciaux se battent comme des chiffonniers pour imposer nos produits. »
En s’opposant jusqu’à mecredi matin au va-et-vient des camions sur les sites d’abattage, les adhérents des FDSEA et JA veulent contraindre les deux groupes qui dans le domaine de la viande « font la pluie et le beau temps » à se mettre autour de la table. « Bigard représente 42 % du marché, Terrena 28% », précise Alain Chabauty, déplorant la concurrence dévastatrice à laquelle ils se livrent. « Ils se tirent la bourre. C’est à celui qui décrochera le marché. » Résultat, un contexte favorable aux marges de la grande distribution se crée au détriment de l’économie des exploitations. « Il faut stopper ces pratiques. Arrêter de se défroquer devant les GMS et imposer un prix qui couvre les charges des éleveurs. »
Présent sur le marché à l’export, Gérard Péverol dit comprendre, mais ne peut agir sur un marché qui n’est pas le sien « et quand bien même ». Rappelant les exigences du droit européen sur les ententes, et les risques financiers encourus pour qui contrevient à la loi, il renvoie la balle aux organisations de producteurs représentatives des agriculteurs. « Faites bloc. Imposez un prix à tous les opérateurs. Si partout en France, les cours au kilo de viande sont revalorisés de 80 centimes d’euro, je ferai avec », affirme le directeur de l’abattoir. Alain Chabauty et ses confrères prennent note. Parce qu’il appartient à la coopérative Terrena, le site de Bressuire restera bloqué jusqu’à mercredi matin. Les tours de garde entre les éleveurs du Poitou-Charentes ont été tenus. Et Alain Chabauty de rappeler : « Les entreprises ne peuvent jamais faire mieux. Se positionner commercialement est la première de leurs préoccupations. Le résultat est sans appel. En France, un kilo de viande est acheté au producteur 50 à 70 centimes de moins qu’en Italie, par exemple ».

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