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Christian et ses sonorités sur mesure pour violonistes avertis

Christian Rault est luthier dans le marais Poitevin. Il s’appuie sur l’archéologie musicale pour restituer, à la demande de ses clients, les sonorités qui ont marqué le Moyen-Age, la Renaissance et la période baroque.

Christian travaille le bois au dixième de millimètre, comme ce rebec en merisier taillé dans la masse, réplique d’une œuvre 13e siècle, trouvée après des heures de recherche en archéologie musicale.
Christian travaille le bois au dixième de millimètre, comme ce rebec en merisier taillé dans la masse, réplique d’une œuvre 13e siècle, trouvée après des heures de recherche en archéologie musicale.
© N.C.

Chacune de ses œuvres est signée Christian Rault – Le Vanneau. Le poinçon a simplement été chauffé à la flamme alimentée d’un mélange à base d’huile de lin. Un coup de marteau précis laissera la marque de fabrique du luthier, sur le fond de la table d’harmonie ou  sur le chevalet.
Ce jour-là, Christian Rault sculpte un rebec dans la masse, réplique d’un rebab à trois cordes, en boyau d’agneau, typique de la culture séfarade de l’époque arabo-andalouse. La violoniste et gambiste de la région qui lui a passé cette commande, lui a demandé « quelque chose du genre rebec ». A partir de là, Christian se met travail. Un travail d’historien, de musicien et de luthier qui le conduit vers un document d’époque et du lieu. Le recueil de chansons illustrées qu’il a trouvé porte le nom de Cantigas de Santa Maria. Le manuscrit illustré de miniatures polychromées est daté du 13e siècle. Il entreprend alors d’en dessiner les contours au crayon, à la taille réelle, sur du papier opaque.
La belle pièce de merisier prend la forme d’une poire. Le dessus de la table d’harmonie est lui aussi bien avancé. Une peau d’agneau tendue finira de la couvrir avant que cette œuvre d’art trouve tout son lustre avec un vernis à base d’huile de lin et de résine naturelle qui aura nécessité des heures de préparation et dont Christian seul a le secret.
Dans son atelier, aménagé dans une ancienne maison du marais, on est loin des salles de cours des Arts déco qu’il a suivis au début des années soixante-dix, et surtout des petits boulots de musicien amateur, jouant de la guitare, de la flûte, du saxo. « Je n’ai pas de formation musicale, explique-t-il, avant de préciser ses origines modestes. » Il touche aussi au métier de verrier dans des ateliers prestigieux qui lui ouvrent les portes de la restauration de vitraux de Notre-Dame de Paris, ou de la cathédrale de Beauvais.
Son œuvre d’examen semble bien loin de son métier actuel : « Un mètre carré de sable qui respire », s’amuse-t-il encore. Les réalités le ramènent vers les horizons de la musique.
« Avec la sculpture en mouvement, il n’était pas possible de vivre ! ». Très vite, il est convaincu que « l’instrument de musique est la plus belle de ces sculptures en mouvement. Quand un tel objet d’art est conçu, il prend son autonomie, avec la complicité du musicien. Il n’est pas figé comme un tableau dans un musée ».
Avant de fabriquer sur commande, et tous uniques, violes, violons, violoncelles baroques, ou liras da braccio, rebecs, vièles et guiternes, de l’époque médiévale et de la Renaissance, il part pour Crémone apprendre les techniques de construction de la meilleure des lutheries : italienne. Là, il s’imprègne de l’atmosphère de Stradivarius qui laisse son nom aux plus prestigieux violons, ceux qui, trois cents ans plus tard, se négocient plusieurs dizaines de millions d’euros. Tout en travaillant le bois pour reproduire les attentes de ses clients, il lui arrive de penser à tous ces musiciens « qui ont eu en main ces instruments qui aujourd’hui me servent de modèle, et qui grâce à eux, ont exprimé leurs peines et leurs joies ».
Différents sons selon les essences
C’est à son art de restituer des sonorités qu’il doit sa réputation internationale et à ses conférences et cours donnés en Espagne, en Tunisie, à Cuba, en Arménie, au Mexique, en Suisse. Christian Rault travaille l’archéologie musicale, les images, les textes et autres iconographies d’époque. « Le client définit un son. Mais les mots ne sont pas suffisants pour cela. Je travaille alors sur les références Amati - flûté, délicat-, ou au contraire Guarnerius - plus large, plus grave », explique celui qui va alors savoir quelle sera exactement l’essence forestière qui conviendra. Essentiellement des érables sycomores et des épicéas « qui poussent au-dessus de
1 500 mètres d’altitude, sur les sols calcaires des versants ubacs de façon à ce que le bois soit plus nerveux, plus résistant. Des arbres des montagnes de Suisse, de Hongrie ou du Jura ». Il faudra du temps avant que le bois soit utilisé. « Aujourd’hui, je travaille avec des arbres abattus en 1982 ! », souligne-t-il.
Les livres, les essais ont parfait sa formation. Mais aussi ses confrères, une poignée d’amis  avec qui il a créé Aladfi. A l’origine, l’association avait pour but, de promouvoir « la construction neuve », « de rompre les secrets de fabrication des anciens ». Avec succès.
« Aujourd’hui, dans les grands concours de sonorité internationale, explique-t-il, les violons neufs raflent la mise aux plus prestigieux violons. » Tel est le résultat du travail en réseau de ces musiciens, chercheurs, scientifiques.
« Les goûts ont évolué avec l’histoire. On cherche à restituer, les faisceaux d’harmonique d’autrefois, celle qui dans une note en contient en réalité 7, 8, 10, 12! Parce que les anciens avaient des systèmes de construction qui mettaient en valeur un large spectre musical. Le bois aide à restituer ces architectures et esthétiques sonores, polyphoniques. » Celles qui lui valent une renommée internationale.

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